1938

Forges du Vent

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Titre

A perte de sens
Ainsi la part
Ameute les miroirs
Ecoute aux meules
Il gelait
Je m'évade
jeu d'échecs (Le)
vent déplace (Le)
Parmi les cheveux
Quand il revint
Que dirais-je?
Tu es là

 

 

 

 

 

 

 

Ameute les miroirs...

 

Ameute les miroirs, décolore les vitres

Et relève la tête, face au Seigneur.

Un poème est prisonnier dans sa cage d'épines,

Petite larve chaude

Qui chante les ailes

Sans connaître leur nom duveté.

Il faut ligoter ciel et terre

Souffrir le battement de ses poignets.

 


 

 

 

 

 

Parmi les cheveux de dix ans...

 

Parmi les cheveux de dix ans, les mains fragiles,

Et les clés de Barbe-Bleue

Je l'entends qui accroche des ailes

Avec un fracas de rêves brisés.

Le vent coule à l'aurore marine

Avec ses sandales d'embruns; son front neuf,

Dénoue les torpeurs oubliées dans la fête de nuit.

Je me retrouve dans les draps broutés du sable,

Un bourdonnement d'amour à l'oreille.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

Tu es là...

 

Tu es là, je tiens ton visage

De corail et de vent

Contre ma chair,

Je confonds soleil, prison.

Des peuples inconnus

Fuient ma convalescence.

Oh ! verse entre mes bras

L'odeur forte des mers.

 


 

 

 

 

 

 

Il gelait à coeur fendre...

 

Il gelait à coeur fendre

Aux terrasses délaissées de l'amour

Des caillots de neige

Fermaient les fleurs comme des voix

Et les Soeur-Anne dans les branches

Attendaient en vain un retour.

 


 

 

 

 

 

 

Je m'évade...

 

Je m'évade

Sous les coquilles rompues du soir

Avec mon sac d'étoiles dans ma poche,

Ma fronde à tuer les heures

Et mon sifflet de merisier,

En échange de quelques larmes

De quelques morsures sous le sein

- Que je comptai à ma jeunesse -

Une nuit vierge de sang.

Tout est là dans cette tendresse de feuilles

 


 

 

 

 

 

 

Le jeu d'échecs...

 

Le jeu d'échecs des toits est brouillé sous l'averse.

 


 

 

 

 

 

 

Ainsi la part est faite...

 

Ainsi la part est faite

Je te laisse les hommes

Des visages défaits

Aux croisées de l'amour

Moi je garde la mer

Et mes châteaux de sable

Et mes larmes du premier jour.

 


 

 

 

 

 

Que te dirais-je?

 

Que te dirais-je si tu reviens

Derrière ce treillis de visages

Passés les relais de l'amour?

Je ne sais plus la romance des îles

Que je massacrais le soir

En revenant sous les tonnelles.

 

Un bruissement de cristal

Aux frontières délicates du repos,

Fait oublier le châtiment le plus juste,

Mais toi, comment pourrai-je t'oublier ?

 

Un jour il faudra te dire

La blessure de la première aube

Au cœur sonore de mon enfance,

Et tu crois que je me souviendrai ?

 


 

 

 

 

 

Le vent se déplace...

 

Le vent déplace sur la dune

Des sacs de pollen, un miel frais

Les mouettes tombent

Aux battements isocèles de leurs rames

Détachée la tunique du jour

Et je suis le premier levé

 

Des écureuils à la lisière

Aiguisent les dents de l'amour

Quittez vos échoppes végétales

Jolies filles

Je vous apporte mon cœur

Comme une pomme de pin.

 


 

 

 

 

 

Quand il revint au hameau…

 

Quand il revint au hameau

Il savait de tragiques histoires

Où les loups égorgent la lune

Aux ronds-points des forêts.

Il avait dans sa veste un godet de ciel bleu

Des images marines

De quoi convaincre sans peine les voisins.

Le malheur fut qu'il reconnut ses frères

Occupés à rouir leurs chevelures

Il tenta de les rejoindre

Mais le courant surpris par une ondée nouvelle

Coula sa barque de mica.

 


 

 

 

 

 

A perte de sens...

 

A perte de sens

L'odeur brûlée des pinèdes

Une faiblesse superficielle

S'est chargée de mes bras

Je me voudrais encore

Sous l'écorce du premier jour.

 


 

 

 

 

 

Ecoute aux meules du couvent...

 

Ecoute aux meules du couvent

Les visages qui se repassent

Un pied est déjà dans la châsse

Et le volet bat sous l'auvent

 

Qu'importe le nom des vivants

Et l'oiseau bleu ou les menaces

J'ai là au fond de ma besace

Le doigt bénévole du vent.