1941.
Je ne suis plus chez moi
Le ciel est sur ma table
À présent
C'est le cœur qui roule dans le sable
Et des bouquets de mer qui flambent sur le toit...(Mer voisine)
Sommaire
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Genèse
Si la terre s'arrêtait de tourner
Si les ailes n'allaient plus jamais se refermer
Si l'homme reprenait l'enfance au premier geste
Le plus clair de son temps
Pour satisfaire l'amour
La neige coulera comme un beau marbre antique
Mais le ciel gardera ses ardoises dorées
Il y aura les hauts visages
Les signes blancs de ceux qui dressent les moissons
Le bruit de pas feutrés derrière la cloison
Les sortilèges des mansardes
On parlera de toi
Et beaucoup du retour
Les mains s'aligneront un soir sur le rivage
Le meilleur de nous deux retenu pour longtemps
Déjà je parle aux arbres
Et mes doigts me suffisent
Déjà les torses flambent au bord du lendemain
Et le soc d'une étoile nous ouvre le chemin.
Mer voisine
Je ne suis plus chez moi
Le ciel est sur ma table
A présent
C'est le cœur qui roule dans le sable
Et des bouquets de mer qui flambent sur le toit
On écoute une voix
Qui passerait la porte
Quelqu'un qui cacherait plus loin
Sa tête morte
Au bas de l'horizon la terre démontée
Tu viens de ce côté
Mais je te vois à peine
A travers cette larme et ce rideau de suie
Il fait nuit
Les oiseaux sont pendus sous les chênes
Bourgneuf-en-Retz
Assez de sangs mêlés au nectar des collines
De peaux mortes jetées sur le bord du chemin
Les membres sont épars dans la luzerne
Je pars aux premiers feux vers les dunes de Lierne
Et quand j'arrive enfin
La mer est déjà là
Ses ailes se détachent
Des quartiers de soleil aussi qui se détachent
Le cœur fait un remous
L'écume et le matin se sont levés sur nous
Un peu de vent qui vole
Plus haut
Dans le grand air
Sont dressées les paroles
On marche en écrasant des mottes de ciel bleu
Tu peux fermer les yeux
Tous les arbres s'éloignent
Des monstres inconnus traversent les campagnes
Les blés sont sur le champ
C'est l'aube
Et l'on entend les fleuves du couchant
Maintenant je suis seul
Mon ombre s'est glissée à l'ombre du tilleul
Il fait nuit
La terre bouge
Les adieux sont tendus au bas du rideau rouge
Nuit de l'autre
Quand j'ai voulu sortir
La porte était trop basse
Et tu barrais la rue de ton accordéon
Mais j'ai vu du balcon
Le ciel ras sur le mur
La mer qui repoussait lentement
Ses fourrures
Et l'échelle de soie qui tombait du plafond
A la clarté du sang
Je dors
Et le coeur veille
Que fais-tu de la nuit
Toi qui n'as pas sommeil
Bord sur bord
Epaule accoutumée à ce flot de tendresse
Au visage glacé qui roule son chagrin
Mes bras ne partent plus hélas et le temps presse
Ecarte de mes yeux les ombres du chemin
C'est un ciel douloureux que retournent les vagues
D'étranges frondaisons ont noyé les steamers
Adieu rameaux de chair qui noircissez nos bagues
Dans ce dernier salut c'est une main qui meurt
Je suis là enchaîné à la fenêtre ouverte
Au bord du monde bleu qui borde ma maison
Le soir n'allume plus les campagnes désertes
Rien ne peut plus fixer le toit de l'horizon
Je songe à des printemps étouffés d'aubépine
A ces amis d'un jour qui puisaient dans mon cœur
Mais ceux que j'attendais sont morts dans les usines
Et le vent verse au loin sa corne de malheur
O sang frais du matin inonde mon visage
Homme jamais aimé demeure mon tourment
Je cherche dans ma nuit des rêves de mon âge
Qui me rendra jamais mon butin de froment
Voyage
J'attends
La pendule et la roue tournent en même temps
Le train s'allume
Et le long des sapins
La grande peau qui fume
C'est la mer
Ne laisse pas ton coeur traîner par la portière
Prends ta place
Il fait bleu
Le ciel couvre la glace
Une étoile s'ébat
Quelqu'un qui s'est manqué se suicide tout bas
Mais je rêve
On a baissé le vent
Et le rideau se lève
Au milieu de la nuit
C'était toi
Mauvais sang
Pour passer cette nuit le ciel change d'allure
Il y a ce remords discret qui me rassure
Je respire plus bas
On glisse du velours à l'orée de mes pas
Une heure tinte
J'ai gardé le silence où ta voix s'est éteinte
Ta main brûle encore
Au loin
C'est un oiseau qui regagne son bord
Mon coeur se ride
Avec toi
Je suis seul dans cette chambre vide
On ne peut plus se voir
La fenêtre est ouverte au fond d'un pavot noir
Plain-chant
Reverrai-je la mer au bord des fûts tranquilles
L'arène bleue où juin roule dans les grillons
Parmi les herbes tapageuses
Depuis vingt ans mes bras coulent de mes épaules
La crue de mes poignets fait déborder mon coeur
Je veux aller plus loin que l'horizon d'ébène
Tresser des incendies par-dessus les moissons
Et fleuve me mêler au rut de tes carènes
Je suis seul
Mais tout seul je puis me délivrer
Elever dans mes mains mon front comme un bûcher
Ecarter de ma bouche le rideau de la soif
Vivant je suis plus grand ce soir que tous les morts
Et puis la route est belle
Les toits portent très haut leur fardeau d'hirondelles
Un essaim de ciel clair s'effiloche au plafond
Je pars
Mon sang léger tinte dans ma poitrine
Vingt ans à mes côtés ombre que tu chemines
A la fin je suis las
Et je voudrais dormir
« Marche encore dans le vent et dans ton repentir
Dans les flots de silex et ta conscience aride
Homme je te reconnaîtrai bien derrière tes rides »
A quoi bon implorer
J'ai repris la besace
Bu mon visage noir tout au fond de la tasse
Et seul vers le midi j'arpente les rayons.
Prise de terre
La nuit s'en mêle
Arrache ces étoiles piquées à tes semelles
Tu t'égares
Tu portes à ton doigt la bague d'un cigare
Et glisses vers ton front des mains artificielles
Regarde
Les oiseaux font déborder le ciel
Rien n'avance
Je roule dans le bleu les yeux de mon enfance
Et c'est toi que j'attends
Pas un mot de l'amour
Nous n'aurions plus le temps
Fin de saison
O sources que le gel éternise en statues
Bourgeons d'étoiles tôt venus
Hautes forêts taillées dans l'écume et les flammes
Oiseaux
Quel oeil hideux vous a pris dans sa glu
Tout glisse lentement sur le dos de la terre
Les bouches sont fermées par une moue sévère
Les torrents ont figé le rire des moissons
La mer ne porte plus ses peaux et ses chansons
Je marche dans la rue où ne répond personne
Détachez de la nuit cette cloche qui sonne
Un homme jeune encore roule dans les taillis
Pour nous
C'est ça la vie
Des bras où rien ne brise
Un feu noir allumé
Le soleil sans sa frise
Et dans le vent léger les cendres d'un ami
Une main douce main
Pour éponger mon coeur.
L'air bleu
Tout est en l'air
Il y a des oiseaux qui volent de travers
On ouvre la fenêtre
Un instant
Tu verras ta tête disparaître
Et tes mains suspendues derrière le coteau
Comme c'était dimanche
Il a fait jour plus tôt
Le soleil se dévide
On a mis des bouquets au creux des lampes vides
Et l'ombre est revenue par le dernier bateau
Maintenant je t'écoute
Avec toi
C'est un peu le grand vent sur 1a route
Et je colle à ta peau
A deux doigts de ton coeur
Il fait chaud
Toujours lui
Hommes qui retrouvez l'écorce la plus verte
Et ces larmes d'enfant qu'on vous avait volées
Courbez votre front noir dans ces deux mains offertes
Allumez le fil d'or qui cerne les volets
Lampe retiens plus haut ce visage de marbre
Et que son beau regard vienne au-devant de moi
J'ai pendu ma vieille ombre au gibet de ton arbre
O Seigneur et cet arbre est devenu ta croix
Tes membres sont chargés de lèpres et de ronces
Le sang met une étoile à l'endroit de ton coeur
Que tu sois seulement la terrible réponse
A ceux qui ont vingt ans et manquent de chaleur
En vain je t'ai cherché au fond des passes grises
Où la mort a jeté ses filets de satin
A la table d'amis ma place est déjà prise
On ne m'a pas gardé les restes du festin
Horreur de ces jours-là mes bras tournent à vide
Et je songe tapi au plus sombre de moi
Que tu n'acceptes pas ces lourdes mains timides
Et que tu n'as rien fait pour détourner ces rides
Déménagement
Tu peux prendre ma place
Le sang que j'ai cueilli n'a pas laissé de trace
Mon ombre m'a suivi en effaçant mes pas
Dans la chambre sans feu
Je ne reviendrai pas
C'est ailleurs qu'on m'appelle
Avril
Et les vergers sont pleins de tourterelles
Le ciel est déjà mûr
Il y a des tessons de soleil sur le mur
Des fleurs sur la rivière
Les ailes des sapins qui secouent leur poussière
Soeur-Anne abandonnée chante au pied de sa tour
Et depuis ce matin
La mer est de retour
Avant-sommeil
Attendez je ne suis pas prêt
La lampe lentement vrille dans ma poitrine
Mon sang fait battre au loin le poumon des collines
Voici l'ombre et les fleurs berceuses de mes pas
Quelques instants encore dans l'ouate des mensonges
Les derniers frets du soir pour les ruelles du songe
Une étoile allumée portée a bout de bras
Le vent frais musicien dans les orgues du soir
La bouche enfin tarie
Bon voyage en enfer sous la tapisserie
Dix heures dans les feuillages têtus de mon enfance
Dix heures
Et le manteau troué de la souffrance
Pour poser mon regard pas un coin de ciel bleu
Chacun de mes retours plus triste qu'un adieu
Tous ces demi-silences
Vous êtes là je sais
Au plus clair de moi-même
Penchés sur mon remords et sur mes lendemains
Puisque vous revenez dans cette chambre noire
O mon père et ma mère
Partagez-vous mes mains
Sans le masque
Tous les chemins sont noirs
Des nuages sont tirés le long du boulevard
Un homme fait sa ronde
On entend une cloche à l'autre bout du monde
Et la main-jeune-fille qui froisse les lauriers
Ici la table est mise
Et tout est oublié
Chacun a son visage
Le duvet bleu du feu suffit au paysage
Et la lampe est au fond comme un blanc peuplier
Alphabet de la mort
O mort parle plus bas on pourrait nous entendre
Approche-toi encore et parle avec les doigts
Le geste que tu fais dénoue les liens de cendres
Et ces larmes qui font la force de ma voix
Je te reconnais bien. C'est ton même langage
Les mains que tu croisais sur le front de mon père
Pour toi j'ai délaissé les riches équipages
Et les grands chemins bleus sur le versant des mers
Nous allons enlacés dans les brumes d'automne
Au fond des rues éteintes où tourne le poignard
Et jusqu'aux étangs noirs où ne viendra personne
O mort pressons le pas le ciel est en retard
C'est à tous les amis que j'offre ma poitrine
A tous ceux qui font l'air et la bonne chaleur
Après ça laissez-moi rouler sous les collines
L'ombre des animaux ne m'a jamais fait peur.
Flamme qui me retiens je souffle ta lumière
Et ces joues colorées qui rallument ma faim
Je glisse lentement. C'est assez douces pierres
Soulevez mes poumons que je respire enfin
Hors de moi
Les cœurs sont à laver
Les plaies sont enlevées
L'étoile d'araignée brille dans la serrure
Il ne reste déjà qu'une ombre
Sur le mur
Et le peu de chaleur que tu m'avais laissée
Qu'importe
On vit sans peine
Une main qui rôdait va souffler sur la plaine
Un pli noir se détend
Et la roue du soleil fait chavirer le temps
Le ciel prend l'air
Me reconnaîtras-tu
Ma peau est à l'envers
Chambre de veille
O chemins traversés de laves et de râles
Ombres du ciel et vous ô gazelles de feu
La terre continue sa ronde sans escale
Et ceux que j'aime encore abandonnent le jeu
Arbres chargés d'oiseaux que s'ouvrent vos écluses
Que l'air froid du matin ranime les bourgeons
Salut au voyageur que son sourire accuse
La poulie du soleil soulève l'horizon
Beau regard églantier de sainte Véronique
Et ton geste amoureux sur les quais de départs
Emporte si tu tiens à cet amour unique
Mon visage caillé dans les plis du mouchoir
Tout sera consumé dans la chambre de veille
La table où le poète allume ses clés d'or
La page inachevée libère ses abeilles
Et la main oubliée macule le décor
Loin de toi j'ai cerné les forêts capitales
Les poitrines jaillies des roses carrefours
Quand la nuit détendue reniera ses cigales
Peut-être auras-tu pris le meilleur de l'amour.
La bête humaine
Je me suis fait tes yeux
Pour t'aimer davantage
Pour être près de moi
Tu manges dans ma main
Cette ombre est à nous deux
Voici le pain
Partage
On dort
Le trou bleu dans le toit fait partie du décor
La paille est fraîche
Je ne sais si c'est toi ou le vent
Qui me lèche
Tout est déjà lointain
Je rêve
Et tu m'attends derrière le matin.
Fiançailles
Nous nous aimons de loin
Belle mort inconnue
Et ma tête est promise
A tes mains fraternelles
Je vis pour mieux mourir
Mes routes sont poudreuses
Un cheval emballé traverse ma veilleuse
Quelqu'un jette mon nom dans l'ombre
A un passant
L'amour qui s'est trompé d'étage
Redescend
Les aubes se compliquent
Vivrai-je encore longtemps sous les rayons obliques
Dans l'air rouge où le cœur repousse son gazon
Si tout doit s'arrêter
Si les poumons se vident
Si mon front a bouclé son chemin sous les rides
Si ma voix ne sait plus les paroles dorées
Alors tu peux venir
Je t'ouvrirai la porte
Mais nous irons dormir ailleurs que dans les prés.
Panique à l'hôtel
La dernière heure
Et soudain
Le frisson amical de la peur
Les mains coupées au bout des branches
Dans le jardin des robes blanches
Les gouttes de lumière qui perlent au plafond
Le pendu qui revit dans la chambre du fond
Au quatrième étage
On traverse en pleurant la place du village
Et l'ombre est encore là
Minuit mais c'est aussi mon sang qui n'attend pas
Je m'enfuis
J'ai peur d'être surpris tout seul
Avec mes larmes
J'ai peur que vous preniez mes poings noirs
Pour des armes
Et de haïr un jour un autre homme que moi.
Eve
Je ne souffrirai plus cette maison trop basse
Le seuil où sont inscrits les rides et les pas
Ni les prunelles vacillantes
Les uns sont passés là
D'autres restés plus bas
Dans la ville
Mais toujours on entend chanter
Les vagabonds partis le bâton sur l'épaule
La route est longue
Et il faut bien parler de l'amour à la longue
Dans la nuit du pommier l'homme a posé sa croix
La voix tendre des feuilles
Celui qui parle et qu'on accueille
Eve qui tremble encore derrière ses seins nus
La main ouverte
Et le fruit mûr
Le soleil met sa gerbe
Tout est clair entre nous
Le sang coule dans l'herbe
Et l'ombre me ramène au bord de tes genoux.
Coeur-mousse
Je connais l'air
La rue s'est échappée d'un roman populaire
Quelqu'un soupire
On a envie de tout casser
Ou de sourire
La porte est là
Et des mains inconnues s'envolent de mes bras
Les arbres sans leurs voiles
Par la lucarne ouverte une poignée d'étoiles
Ce qu'on dit en passant
La voix qui tire encore sur les rênes du sang
Tout arrive
Tu reviens
Et je prends tes lèvres primitives.
Rideau
On ne trouvera plus que cendres dans mon lit
Un sang amer m'aura consumé cette nuit
Déjà j'ai rejeté mon cœur loin en arrière
Et mes chevaux vingt ans ont sauté la barrière
Ainsi le temps n'est plus où je secouais les astres
Où un geste effaçait les ombres du chemin
Je portais le front de la terre entre mes mains
J'étais semblable aux vents aux grands soleils vivaces
Mes yeux bleus remettaient chaque ciel à sa place
Il y avait encore le miel sur les collines
Des guêpes endormies dans la paix des poitrines
Et les matins d'hiver traversés par l'amour
Maintenant tout est clos
Les fleurs sans leur poison
L'horloge crucifiée au bord de la cloison
Les portes qui s'ouvraient jadis entre les branches
Et les cloches roulant les pentes du dimanche
Qui touchera jamais la corde de mon cœur
Certes pas les oiseaux ni tes seins jeune fille
Des éclats de ma chair pourrissent sur les grilles
Remords peut-être es-tu ma première douceur
L'âme en peine
L'arrêt brusque du ciel
Les roues de la voiture
Partir
Etre à des kilomètres
Sous les ramures
Dans chaque chambre celui qui vient
Les hommes sont masqués
Mais je n'y suis pour rien
Je veux vivre
Voici mes mains ouvertes comme un livre
Et les signes noirs du destin
Là-bas la maison blanche
La mer et ses jardins
Et les enfants-volants oubliés dans les branches
Dernier signe à Levanti
Loin de tout ce qui berce cette maison blanche
Le sang de ton ami le bruit léger d'un pas
Loin du ciel englouti qui garde dans ses branches
L'agonie de tes mains et de Casablanca
Tu tournes sans espoir entre les portes closes
C'est la fin de novembre et les chambres d'hôtel
Un peu d'ombre inclinée au bord de tes prunelles
Et des tapisseries où sont fanées les roses
Ferme ces pampres noirs où se crispe ton coeur
Il flotte sur tes lèvres un voile de paroles
Et tandis que tes pleurs déplissent leur corolle
Ton ombre traîne au loin des algues de douceur
Jamais plus tu n'iras dans les havres déserts
Ni dans les bleus chantiers que dressent les orages
La nuit couvre de feu le reste de ta page
Et tu glisses déjà sur le versant de l'air
Voix tissée de sanglots qui roules sur mon âme
A l'heure où le soleil fait éclater ses liens
Devant la table où monte une dernière flamme
Chaleur de mon ami c'est toi qui me retiens.
La cloche de Mai
Je ne suis pas parti
Tout est là
Sur la table
Ah pouvoir soulever ces paumes misérables
Dans le vent bleu
Les bras commencent à chanter
La mer se déshabille
Les arbres sont hantés
Les doigts du chèvrefeuille ensanglantent la grille
Et les bonnes paroles tombent de mon côté
Le ciel danse
Sur les pistes du sang c'est mon cœur qui se lance
Il faut aller plus loin
Je tourne autour de toi
Et ta voix me retient.
Sans retour
Mes clous se sont gravés dans la peau du village
Mon ombre détachée gaspille ses rubans
Roule encore dans tes doigts la houle des cordages
Tous les signes du ciel sont pris dans les haubans
Rien ne chantera plus sous les moissons désertes
Sous les lampes dorées où rôdait l'abandon
Devant ton sacrifice une main s'est offerte
Mais tu as refusé en demandant pardon
Ta place est effacée dans le sable et la glaise
On n'atteint plus ton cœur en attisant les braises
Les draps n'ont pas gardé la rouille de ton corps
Ce n'est pas ton odeur qui flotte sur le port
En vain je cherche encore ta chaleur sous la table
Quand les lames brisaient l'acier de mes genoux
Le feu est à refaire et la nuit misérable
Jette son grappin noir quand tu n'es plus chez nous
Grands soleils inutiles effacez mon sillage
Séchez le fard de sang qui maquille ma joue
Mes yeux l'ont reconnu derrière son grillage
Offrant à Dieu sa coque illuminée de trous
Il est sur l'océan à portée des étoiles
Le flot a entamé sa poitrine d'airain
Mais il va souriant. C'est sa peau qui fait voile
Une averse de joie le roule dans ses grains.
Fond de ciel
La route
Les grands airs
Ceux qui vivent à coeur ouvert
Le temps qui passe
Un peu de ciel au fond des tasses
Après midi l'odeur des foins
Et l'ombre lasse dans un coin
Loin de tout
Des mains qui se lancent sans bruit
Des bras qui sillonnent la nuit
De toi
Qui fais le paysage
Toute voix dehors
Je suis là
Soldat
J'ai longtemps attendu dans le bleu de la plaine
Apprivoisant les mains qui glissaient dans le vent
Il y a eu des cris vers l'Est
La femme et le chemin sortis d'un même geste
Un visage incliné sur la joue du couchant
Puis l'ombre a refermé la place restée vide
Il est là maintenant
Sous la terre encore fraîche
L'air a gardé l'éclat du dernier coup de bêche
Les clés de son royaume sont tachées de sang
Homme tu n'iras plus dans les maisons tranquilles
Où le bras d'une lampe écartait les soupçons
Tu ne chanteras plus en revenant des îles
Derrière ta poitrine et ses lourdes moussons
Sur tes yeux le soleil a brisé son feuillage
Entre dans les maïs et cherche ton passage
O coeur sois partagé par le fer des charrues
Nous parlons
Et c'est lui qui redescend la mer
Poitrine large ouverte
Epaules couronnées de lourdes plantes vertes
Belle tête accrochée au feu de sa toison
Car son corps désormais fait partie des saisons.